♌drank baby drank. (BILLY)

Parfois, il m'arrivait d'avoir envie d'autre chose que mon motel. Parce qu'il fallait bien l'avouer, j'avais une vie monotone à pleurer. Enfin, je n'avais jamais rien connu d'autres, mais, je ne sais pas. Couchée, ou plus tôt affalée comme une otarie albinos sur mon lit, je regardait le plafond ahurie. Non vraiment, ce soir, je ne suis pas bien et je m'ennuie pire qu'un rat mort, c'est pour dire. Je tente une approche vers la télévision mais encore, rien de bien fameux. Je tombe sur un film qui se déroule dans une boîte de nuit où les gens boivent, danse, couchent ensemble dans les toilettes et bizarrement, une seule réaction me vient, peut-être pas la bonne d'ailleurs, je souris. Comme une débile. J'aimerais être à leur place, savoir ce qu'est la sensation de quand on est bourré mais qu'on a encore envie d'un verre. La sensation des basses qui tambourines dans le cœur. Les seuls tambourinements auxquels j'ai eu droit jusqu'à maintenant sont ceux des feux d'artifices de Santa Rosa tous les ans à la même époque. Je somnole, et puis, un bruit de porte qui claque, ou d'une tête qui claque contre une porte, me réveille. Je me lève, la tête dans.. le lit encore, sort de ma chambre et me retrouve dans le hall du motel pensant que j'ai affaire avec un mec qui cherche une chambre, très tard, peut-être bourré ? Je m'approche de l'ombre qui est entrée et découvre que mon homme est en fait une femme et qu'elle est vraiment dans un sale état. Je m'approche d'elle et pose une main sur son dos. J'ai dû appuyer sur un bouton ou quelque chose mais du coup, elle vomit. Trop classe. Mes émotions de tout à l'heure ? Je les retire tout de suite. " Est-ce que ça va ? " dis-je une fois que la demoiselle a fini. L'odeur est atroce m'enfin. J'attends sa réponse avant de l'abandonner quelques instants pour aller chercher du papier essuie tout et le lui tendre pour qu'elle s'essuie la bouche. Je m’accroupis vers elle, assez inquiètes. " Vous allez rester là ce soir, hein. " finis-je par dire. Vu son état, il ne vaut mieux pas qu'elle reparte.

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drank baby drank.
billy & silöé

Je marche au hasard dans les rues sans vraiment me soucier d'où je vais. Quelle importance au fond ? L'imprévisibilité est la plus belle des choses, la plus efficace pour combattre l'ennui. Je trébuche un peu, ne marche plus tout à fait droit. Je crois que je ne vois plus tout à fait clair non plus. Bah, c'est pas grave, de toute façon, il ne peut rien m'arriver de méchant. Je rigole un peu quand je me rends compte qu'il se met à pleuvoir et je laisse les fines gouttelettes dégouliner le long de mon corps sans en éprouver le moindre agacement. Je commence à avoir mal aux pieds et je finis carrément par enlever mes chaussures, parce que bon, entre nous, c'est beaucoup plus simple pour marcher quand on n'a plus toute sa coordination. Sauf qu'il pleut de plus en plus fort et je finis par être complètement trempée. Résultat, je me réfugie dans un vieux motel. Si la façade ne paye pas de mine, l'intérieur n'est pas si mal. Et puis bon, tremblante et dégoulinante comme je suis, j'ai laissé mon exigence avec le cadavre de ma bouteille.

Une blonde sort d'une chambre et s'avance vers moi. Surement la proprio. « Est-ce que ça va ? » Je la regarde d'un air un peu étrange. Bien sur que je vais bien, pourquoi est-ce que ça n'irait pas, hein ? Je m'apprête à affirmer haut et fort que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes quand je sens mon estomac se soulever et que je finis par tout rendre par-terre. Ouais, on a déjà vu plus classe. Remarque, c'est peut-être pas plus mal, je me sens mieux maintenant. J'arrive même à esquisser un sourire et un faible merci quand elle me donne un bout d'essuie-tout. S'il y a bien un désagrément dans le fait de trop boire, c'est celui-là. Être autant malade, c'est pas cool du tout. Comme la gueule de bois du lendemain, en fait. Mais bon, on s'y fait à la longue. Je ne me souviens plus exactement combien de verres j'ai bu mais j'ai dû m'en enfiler un sacré nombre parce que je tiens particulièrement bien l'alcool et là, ben, je suis pas tout ce qu'il y a de plus lucide. « Vous allez rester là ce soir, hein » Elle est plutôt gentille comme fille, la petite blonde. Et si c'était juste un piège pour m'obliger à lui payer la chambre parce qu'elle n'a pas assez de clients ? L'alcool accentue toujours ma paranoïa. Je la regarde d'un air légèrement suspicieux avant de déclarer : « J'ai pas d'argent pour une chambre » C'est vrai ça, tiens, qu'est-ce que j'ai fait de mes affaires ? Ah oui, elles sont chez le seul type assez gentil pour m'héberger comme ça, sans rien demander en échange.

Souvent je recevais des hommes pas tout là, ou alors vraiment bizarre, même parfois pire que la demoiselle que j'avais en face de moi, mais là, je me sentais un peu déconcertée face à elle. Elle venait de vomir sur mon parquet et je n'étais même pas énervée, en fait j'étais plutôt inquiète. Je n'avais jamais vu ça, à part à la télévision comme ce soir. Je crois que les soirées où les filles buvaient comme tes trous s'appelaient les skins party. Mais je n'en avais jamais fait et vu l'état de la fille en face de moi je n'avais pas l'intention d'en faire. Je vois bien qu'elle essaie de me montrer que tout va bien, je veux y croire, après tout si elle était dans cet état là c'est qu'elle en avait eu envie, je suppose. Je lui proposais de rester, en oubliant un petit détail qui me revint une fois que j'eus parlé. Il ne me restais aucune chambre ce soir. Je jetais un œil au comptoir, aucune clé n'était disponible. « J'ai pas d'argent pour une chambre » dit-elle après s'être essuyer la bouche. Je lui souris, la prit sous le bras et l'aida à se relever. Mon sourire se voulait rassurant, genre ne t'inquiètes pas, ça va aller. Puis en même temps, je me trouvais un peu débile de faire toute cette scène juste pour une fille bourré. Sainte Silöé, priez pour elle.. " Ne vous inquiétez pas pour ça, je n'ai plus aucune chambre. " finis-je par lui dire sans aucun ton. Elle me regarda bizarrement. Je l'emmenais avec moi jusque dans ma chambre et la fit assoir sur mon lit. Elle dormirait ici ce soir et moi, j'occuperais le canapé du hall ou le fauteuil de ma chambre. " Vous dormirez dans mon lit. " Et elle avait intérêt d'accepter, je ne la laisserais pas sortir comme ça sous la pluie, dans la nuit. Elle avait de petits yeux, surement rétrécis et explosé à cause de l'alcool et toute sorte d'autres trucs dont j'ignorais le nom. Elle ne tenait plus réellement sur ses jambes ni vraiment assise. Je me sentais impuissante là. Moi, la pauvre petite gérante de motel qui ne connaissais rien à la vie.

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Elle affiche un sourire rassurant, le genre de sourire qu'on fait à un enfant qui ne retrouve pas ses parents, ou à quelqu'un qu'on va secourir après une catastrophe. Apparemment, c'est aussi le genre de sourire qu'on fait à une fille plus très lucide qui vient de dégobiller sur votre plancher. Elle m'aide à me relever en douceur. « Ne vous inquiétez pas pour ça, je n'ai plus aucune chambre. » Je la regarde sans comprendre. D'accord, j'ai le cerveau complètement embué par l'alcool mais j'arrive toujours à comprendre que si elle n'a aucune chambre de libre, je ne pourrais pas en occuper une. Elle me prend doucement par le bras, sans me brusquer, et m'amène dans une chambre où elle me fait gentiment assoir sur le lit. Je ne comprends toujours pas ce qu'elle cherche à faire. Je la fixe essayant vainement de comprendre ce qui lui passe par la tête. C'est plutôt mal parti sachant que j'ai même du mal avec ce qui se passe dans la mienne « Vous dormirez dans mon lit. » Bah ça alors, quelle drôle d'idée ! Pourquoi est-ce qu'elle me laisserait son lit ? Je suis une complète inconnue et elle n'a aucune obligation envers moi. Certaines personnes que je connais ne voudraient même pas m'héberger, même si je m'écroulais en arrivant chez eux. Ce n'est pas le moment idéal pour raisonner, j'ai du mal à entendre mes pensées tellement les moindres bruits résonnent dans ma tête. Je m'appuie contre le mur, ayant un peu de mal à tenir assise. « Pourquoi tu ferais ça ? Me laisser ton lit ? Tu ne me connais pas et je viens de vomir sur ton parquet. » Elle ne semble pas s'offusquer de ce tutoiement improvisé. Je la fixe avec un regard soupçonneux. Qu'est-ce qu'elle peut bien vouloir ? Elle n'a pas l'air de rechercher une compensation de ma part mais je ne suis pas habituée à la générosité des gens. Je ne me remets toujours pas d'avoir trouvé quelqu'un pour me prêter une chambre pendant que je reste à Santa Rosa. C'est alors que j'ai une illumination dans mon cerveau embué par l'alcool. « Tu ne serais quand même pas la réincarnation de Mère Teresa ? » Outre ma paranoïa, j'ai toujours des idées légèrement farfelues quand je suis bourrée.

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