Elles étaient arrivées aux abords de Santa Rosa la veille. Comme à chaque fois qu’elles faisaient arrête quelque part, Ana avait passé de longues heures à s’émerveiller sur la beauté des lieux et d’autres choses dans le même genre. Sa sœur l’avait regardé étrangement, un peu moins que d’habitude certes, mais étrangement quand même. Ana n’était pas sûre que sa vision de l’environnement qui l’entourait correspondait vraiment à celle qu’en avait sa sœur. Là, où Ana voyait un endroit merveilleux, Angie ne devait voir qu’une petite ville parmi tant d’autres qu’elles avaient déjà traversés.

Elle avait passé la nuit au motel, là encore, Ana avait passé une bonne partie à s’extasier sur l’aspect de celui-ci. Pourtant, d’extérieur, il n’avait rien d’un endroit où on avait très envie de passer la nuit. Au contraire, Ana pensait qu’il aurait pu être le type même de lieu qui apparaissait dans les films d’horreurs. Mais, elle ne s’était jamais démonté pour si peu, et ce n’était pas là que ça allait commencer. Du reste, elle avait passé une excellente nuit là-bas.

Elles ne devaient pas repartir tout de suite mais sa sœur avait tenu à aller faire le plein de leur si chère voiture ce matin-là. Ana l’avait donc suivie, et tandis que sa sœur était occupée à la station essence, elle était partie marcher un peu autour, histoire de découvrir les environs. Ses pas ne l’avaient pas mené bien loin, en effet, elle avait décidé d’entrer dans la petite épicerie en face. Elles avaient quittés New-York depuis quelques semaines, et dans leurs affaires, le manque se faisait sentir de plus en plus. Ce n’était pas grand-chose, un tube de dentifrice vide, une boîte de tampon qui aurait besoin d’être remplacé, un peu à manger. Ana se mit donc en quête de tout ce qui leur manquait. Cela lui prit un bon moment avant d’arriver à trouver tout ce qu’elle voulait. Elle avait plus l’impression de se retrouver dans un truc à bazar plutôt que dans une véritable épicerie. Au bout d’une petite heure, elle pensait avoir tout ce dont elle avait besoin. Alors qu’elle allait régler, elle se rendit compte qu’elle avait oublié de prendre du pain. Peu désireuse d’avoir à retourner, elle regarda alors le vendeur avant de lui demander. « Excusez-moi, vous avez du pain ? » Il la regarda avec un air de franche incompréhension. La jeune française soupira, évidemment, si elle le disait en anglais ce serait sûrement mieux. « Do you have breed ? » Apparemment, ce n’était pas mieux, en jugea-t-elle d’après la tête de l’homme en face d’elle. «Breed, to eat. » Elle soupira de nouveau, devant l’air interdit de l’inconnu. Finalement, elle n’aurait sûrement pas d’autres choix que de chercher elle-même.

Anastasia était tellement occupée par l’exercice difficile que cela représentait de se faire comprendre du vendeur, qu’elle n’avait pas remarqué que derrière des gens connaissait à attendre. Une personne en fait. Elle ne comprenait pas vraiment ce qu’il se passait, jusqu’ici elle n’avait pas vraiment eu ce genre de problème pour se faire comprendre. Enfin, il y avait toujours ou sa sœur ou quelqu’un d’autres pour l’aider à se faire comprendre. Cela montrait encore une fois à quel point elle était incapable de se débrouiller par elle-même.

Néanmoins, résolut à obtenir, au moins une fois, ce qu’elle voulait par elle-même, elle décida de parvenir à se faire à comprendre. Et tant pis pour ceux qui attendait derrière. Elle s’apprêtait donc à reprendre la parole lorsqu’une voix derrière elle s’éleva. « It's Bread. » Ana se retourna surprise et regarda d’un air légèrement hébétée la personne derrière elle à qui elle avait à peine prêter attention jusqu’ici. C’était une jeune femme blonde, qui devait avoir à peu près dans ses âges. Elle avait les bras chargés de se courses mais elle ne semblait pas agacée par l’attente à ce que pu en voir Ana. Elle avait juste l’air un peu amusée. Ana soupira. « I think she wanted to say BREAD. PLEASE. » Elle avait le regard fixé sur le vendeur et venait d’ajouter cela alors que ce dernier ne semblait pas vraiment réagir encore. Cette fois, il sembla comprendre tandis qu’Ana n’avait même pas la présence d’esprit d’acquiescer. C’était bread et non breed, elle qui voulait se targuer d’arriver au moins à parler l’anglais correctement venait de faire une erreur sur un mot basique. Et sa fierté en avait pris un léger coup. Elle essaya de cacher cela, et hocha la tête tandis que le vendeur répondait vaguement oui. Nouveau soupir de la part d’Ana, c’était ce qu’elle faisait le mieux quand elle perdait patience, soupirer. « And where is it ? » dit-elle d’un ton vaguement agacée en montrant l’étendue du bazar derrière elle. Elle espérait vraiment que cette fois si, il comprendrait, histoire de ne pas entacher encore un peu plus son orgueil. Et apparemment, il avait compris. Du moins, c’est ce que pensa Ana quand elle le vit s’éloigner en direction de l’intérieur du magasin, il avait du se dire que donner des explications à la jeune femme mettrait encore plus de temps que d’aller le chercher lui-même.

Ana eut un petit sourire satisfait et puis, elle se retourna vers la jeune femme derrière elle. Elle avait d’abord été agacée par elle, cette personne qui se permettait d’intervenir alors qu’elle essayait de se débrouillée seule et qui en plus avait un air amusée qui donnait clairement l’impression à Ana qu’elle se moquait d’elle. Mais maintenant, qu’elle était d’un peu meilleure humeur grâce à son minuscule succès, Ana était beaucoup plus apte à la remercier – même si évidemment, elle n’aurait pas eu besoin d’elle – mais également à s’excuser pour l’attente occasionner. « Je suis désolé hein. » Et puis elle tenta de se justifier. « Ce n’est pas toujours comme ça. » Et puis, finalement, elle se résolut à la remercier, plus évasivement. « Et merci. »